Marchés publics et télécoms, le mariage impossible.
Depuis que nos offres commencent à être connues – et reconnues ! – dans le monde de la fibre optique, certaines communes font appel à nos services dans le but de comprendre plus en détail leur complexe facture télécom.
L’ampleur du problème est telle que pour des communes de taille moyenne (40k habitants), ce sont des factures de plusieurs milliers d’euros par mois qu’il nous est demandé d’analyser, pour des contrats connectant une flotte de mobiles, de téléphonie fixe, et d’accès internet, répartis sur de nombreux sites communaux, et dont la nature des prestations est souvent obscure.
En atteste le temps passé à ces analyses, car lorsque nous devons reprendre chaque site, vérifier son besoin et valider le choix technique qui a été fait, cela peut prendre plusieurs jours, ou semaines selon l’ampleur de la tâche, représentant des facturations importantes aux collectivités.
Ces études, très fastidieuses, réalisées par nos équipes expertes en marchés des télécoms, permettent systématiquement de mettre en avant les anomalies, souvent grossières ou très coûteuses, de raccordement ou de téléphonie.
Par exemple, on peut découvrir au détour de certaines factures, des accès FTTO, voire des Lan to Lan inter-sites, à des débits honorables allant jusqu’à 1 Gb/s, et pouvant être facturés plus de 2500 € HT / mois depuis plus de 10 ans.
Certes, ce prix pouvait se justifier au temps où la fibre n’était qu’un vague mirage, mais cela ne justifie ni le maintien, ni la non-renégociation des contrats à chaque échéance contractuelle.
La faute aux changements de bords politiques, aux élections re-brassant l’ensemble des forces vives d’une mairie tous les 6 ans, et, mettons les pieds dans le plat : aux copinages entre élus et représentants commerciaux de certains opérateurs.
Par la même, il est très courant d’être témoins d’accord « cadre », obligeant une mairie, sur parfois plus de 15 ans d’engagement, de souscrire l’ensemble de ses besoins télécoms auprès d’un seul opérateur, national évidemment, sans avoir validé une quelconque grille de prix à l’avance, ou renégocié les termes de cette exclusivité dans le temps.
Et c’est ainsi, que mandats après mandats, une commune peut se retrouver à disposer d’un nombre d’accès ou de téléphones particulièrement volumineux, à des prix très divers et variés (souvent pour une même prestation, la faute aux aléas marketing), et dont la maîtrise finale n’est pas toujours évidente pour les services informatiques publics.
Il est hallucinant, dans notre marché régulé et libéralisé, que nous assistions à certaines scènes entre des Maires, des Adjoints, ou des Vice / Présidents d’agglomérations, et des représentants d’opérateurs nationaux, qui partent parfois en vacances, déjeunent dans des restaurants prestigieux, ou disposent d’une puce 4G illimitée et gratuite, en échange d’un accord d’exclusivité avec ledit opérateur.
Ayant été élu dans une commune semi-urbaine du département du Nord pendant 4 ans, je peux notamment attester (et j’ai précieusement gardé le dossier), qu’il m’a été remis un dossier, de près de 150 pages, par l’opérateur historique, présentant tous les bienfaits de son action locale dans les télécoms, et proposant évidemment une incroyable panoplie de prestations dont la souscription est facilitée par la mise à disposition d’un bon de commande spécialement formaté pour être traité par les trésoreries municipales.
Que dire aussi, des rumeurs, « on-dit », et autres affabulations souvent proférés par nos confrères opérateurs à l’encontre des opérateurs locaux, prétextant de notre incompétence, et de notre incapacité à innover. C’est bien mal connaitre le monde des opérateurs régionaux et locaux. Cette proximité doit certainement faire peur à certains représentants, se sentant mis à l’épreuve par des « petits nouveaux » qui ont tout à prouver, et tout pour réussir.
Ce lobbying, particulièrement bien exécuté, vise aussi, parfois, à amener les élus à adapter leur marchés publics afin qu’il puisse rentrer dans les « cases » des produits de l’opérateur lobbyiste. L’exemple le plus flagrant et récent que je peux vous citer concerne le marché public de la ville de Quiévrechain (département du Nord), qui exigeait dans son CCTP, de pouvoir disposer d’un accès T0 à T2 analogique. C’est bien sympathique de l’exiger, sauf qu’il est impossible de commander ces accès auprès de l’opérateur historique depuis maintenant quelques années, afin de forcer l’évolution technologique vers les solutions IP et numériques.
Dans ce même marché, il est question également de téléphonie mobile. Et bien pourquoi pas proposer nos services ?! Nous sommes opérateurs MVNO depuis maintenant presque 1 an ! Et bien non, raté. Le pouvoir adjudicateur exige un grand nombre de fonctionnalités tel qu’un logiciel de MDM (Mobile Device Management) facturé directement sur les abonnements. Malheureusement seuls les grands opérateurs disposent en général des outils permettant de répondre à ce besoin. Nous étions peut-être moins chers ? Nous ne le saurons jamais, puisque nous n’avons pas répondu à ce marché pour ces raisons (et il y en a beaucoup d’autres).
Que penser alors de ce marché public ? Est-il truqué ? Est-il manipulé et adapté afin que seul l’opérateur actuellement fournisseur puisse répondre en continuant simplement sa prestation actuelle ?
Il est difficile de répondre à cette question puisque cette mairie a notamment décidé de ne pas nous consulter en tant qu’opérateur local, situé à moins de 15 Km de cette commune, et pouvant proposer des prestations équivalentes et à tarifs percutants.
Ces élus ne disposent-ils pas des compétences pour comprendre les enjeux de leurs marchés et du lobbying dont ils sont victimes ? Est-ce que ces élus sont en réalité tout à fait conscients des décisions qu’ils prennent ? Il est bien délicat de le dire. Mais la question est ouverte, et je la trouve très pertinente.
Si l’on reprend l’ensemble des demandes qui nous ont étés formulées par les mairies, qu’elles soient rurales, ou urbaines, petites ou grandes, nous avons pu faire baisser la facture télécom en moyenne de 40 %, ou permis d’augmenter le débit de façon significative (parfois par un facteur x1000) à un coût strictement identique à la solution précédente.
La vraie force de notre action, c’est surtout d’être à l’écoute des craintes, des peurs, ou des incompréhensions des élus. Lorsqu’ils sont humbles et nous expliquent qu’ils « ne comprennent rien à qui fait quoi dans les télécoms », nous les aidons, leurs expliquons et les formons à la compréhension du monde des télécoms, et de l’organisation qui s’articule actuellement en France. Et c’est souvent à travers cette prestation gratuite de conseil, que nous gagnons la confiance des élus qui nous ouvrent leur porte, et via laquelle parfois, nous apportons des solutions pertinentes, locales et personnalisées à toutes les collectivités qui nous le demandent.
– Article rédigé par Jérémy MARTIN, PDG de Techcréa Solutions.